Les élections départementales des 22 et 29 mars s’annonçaient comme la première et incontournable victoire de l’UMP en 2015. S’il semble assuré que ce rendez-vous électoral sera calamiteux pour la gauche, la partie est loin d’être gagnée pour la droite qui pourrait se voir voler le succès par un Front National en embuscade.
Tapi, dans l’ombre, le Front National attend de moissonner ses votes en mars. Les sondages ne cessent de le conforter dans ses certitudes. La dernière enquête Odoxa pour Le Parisien, livré le 2 mars, annonce le FN en première place avec un record de 33% des intentions de vote, l’UMP serait seconde, avec 27% et le PS, loin derrière avec seulement 19%.
L’autre chiffre qui retient l’attention c’est celui de l’abstention qui serait de 57% (sondage Ifop pour Le Figaro du 23 février). C’est là que cela se corse, pour le PS d’abord, car avec un tel niveau d’abstentionnistes, difficile pour le troisième d’atteindre les 12,5% de votants pour se maintenir au second tour. Se profilent donc un grand nombre de candidats PS qui pourraient être éliminés dès le premier tour.
Le fait frappant de ce dernier sondage est sans doute l’enracinement du Front National, sa banalisation et sa capacité à rebondir sur son succès des dernières municipales. Ainsi, 1200 de ses 1600 élus municipaux seront candidats aux départementales, ce qui va assurer au FN une présence dans 93% des cantons. Un autre record.
Lors du lancement de la campagne de son parti pour les départementales 2015, Marine Le Pen précisait, à juste titre, « c’est au niveau départemental que la marche est la plus haute pour nous » et poursuivait « une victoire dans un département serait une bonne surprise mais une véritable surprise ». En cause le scrutin majoritaire à deux tours. Néanmoins, une forte présence au second tour, comme le laissent présager les sondages, pourrait conforter un peu plus la dynamique du FN et le positionner dans un rôle d’arbitre ou au moins de trublion sérieux.
Cette situation pourrait également limiter l’ampleur de la victoire annoncée de l’UMP et, en conséquence, durcir un peu plus les tensions internes autour des stratégies à adopter face au Front National, notamment dans les situations de duels de second tour. Autre sujet qui devra peut-être être abordé plus sérieusement par le parti de Nicolas Sarkozy, que faire lors des désignations des exécutifs lorsque les voix des élus FN seront nécessaires ? Pour le moment, les mots d’ordre sont fermes mais dans la réalité du terrain…
Surtout, ce scrutin pourrait installer le FN comme premier parti de France, confirmer sa lancée vers 2017 et, d’ici là, vers les régionales et la possible conquête de quelques régions. À droite, l’arrivée de Nicolas Sarkozy à la tête de l’UMP ne semble pas en mesure de retenir cette force montante. À gauche, même constat, il y a une incapacité à remonter la pente électoralement, pour le moment.
Paradoxalement, ni la gauche, pourtant au pouvoir, ni la droite, réputée première opposante, ne semblent proposer d’alternative satisfaisante au FN. Des deux côtés de l’échiquier on refuse de s’intéresser au chiffre incontournable de ce sondage : le taux d’abstentionnistes, un coeur d’électeurs à reconquérir. Vite.
Mathieu Quétel, président de Sountsou