Les relations institutionnelles ont connu leurs grandes heures il y a quelques années et de nombreuses « affaires » ont été rendues publiques, encore très récemment. Le fameux carnet d’adresses, que nous évoquions la semaine dernière, est au coeur de ce que nous appelons le lobbying « à la papa », celui qui repose, précisément, sur la commercialisation de réseaux construits au cours des années et « d’amis bien placés ».
Si connaître des décideurs et pouvoir les joindre reste bénéfique, cela ne suffit néanmoins plus à construire une démarche institutionnelle efficace sur le long terme et qui tienne compte à la fois des besoins de l’entreprise et de l’évolution de son environnement politique. La majorité des élus d’aujourd’hui, notamment la nouvelle génération, sont différents de leurs aînés ; ils sont eux-mêmes plus exigeants et porteurs de valeurs. Les récentes déclarations d’intérêt sont éloquentes à cet égard. On constate que les nouveaux parlementaires agissent de façon bien plus transparente que certains vieux briscards de la politique…
Une nouvelle génération d’élus est apparue, ces dernières années, qui refuse de commettre les erreurs du passé et de perpétuer les comportements de certains de ses aînés. Il n’est plus rare de voir des parlementaires dénoncer publiquement (sur Twitter, en particulier) les cadeaux reçus de telle ou telle entreprise et jugés déplacés.
Certains reportages récents diffusés à la télévision sur des « clubs parlementaires » financés par des industriels ont eu des effets dévastateurs, à la fois pour les élus concernés et pour les entreprises qui s’adonnent encore à de telles pratiques.
Un jeune parlementaire m’a raconté une anecdote amusante. il a été invité à un dîner de « traitement des parlementaires de bases » par un grand patron (ces dîners réunissent une vingtaine de parlementaires membres de la même commission). Ces élus étant classés « de base », ils sont invités en groupe mais ont l’insigne privilège de dîner en présence du P-dg de cette entreprise du CAC 40… Ce dernier passe le temps de l’entrée et du plat à expliquer toute l’importance de son entreprise et ses enjeux sans s’occuper aucunement de ses invités. Notre jeune parlementaire ose le contredire sur un chiffre qu’il juge inexact et se fait littéralement « souffleter » en retour…
Nous sommes dans une situation-type du lobbying « à la papa » : pas de respect pour le parlementaire « de base », une gestion collective des élus, aucun intérêt pour eux, pour leurs propres préoccupations, leurs convictions et un seul but : « vendre sa soupe ».
Des méthodes dépassées, d’une autre époque, aujourd’hui inefficaces…
Cette exigence nouvelle (effet du numérique ?) impose donc de revoir les méthodes suivies dans la relation institutionnelle. Celle-ci ne peut plus se limiter à quelques contacts avec les seuls élus « décideurs » et bienveillants à l’égard de telle ou telle problématique.
La démarche de persuasion et de d’explication doit être plus systématique et, disons-le, plus professionnelle.
Tourner le dos au lobbying « à la papa », c’est résolument adopter une démarche de relations institutionnelles de conviction et de valeur. Cela demande plus de temps, c’est difficile et exigeant mais beaucoup plus efficace.
Mathieu Quétel
Président de Sountsou, auteur des Cahiers Experts « Les 10 erreurs à éviter en relations institutionnelles »
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