Emmanuel Macron vient donc de franchir le pas. Le sémillant ministre de l’Economie a lancé, mercredi 6 avril, son mouvement, apolitique, « En marche ! ». Pour qui ? Pour quoi ?
Il y a quelques jours Emmanuel Macron lançait « Les jeunes avec Macron » et son Think tank « La gauche libre », désormais il dispose également de son mouvement « En marche ! » qu’il souhaite transpartisan et accueillant pour les « déçus de la politique » qu’ils soient de droite ou de gauche, salariés ou chefs d’entreprise. Les réseaux sociaux devraient constituer un support essentiel de développement pour les outils du ministre qui est, de toute façon, également très présent dans les médias. Maintenant, c’est l’objectif de tout cela qui pose question.
Macron agace dans son camp et cette nouvelle initiative ne devrait que cristalliser un peu plus les rancoeurs. Il ne s’agit pas d’un problème pour lui, presque d’un atout, puisqu’il assume une démarche différente qui vise à ringardiser les partis traditionnels. Néanmoins, une ambition et un projet ne se construisent pas sur de simples slogans.
Récemment encore, sur Europe 1, il affichait sa totale loyauté à François Hollande. Une mise en orbite pour 2017 ne serait donc pas l’objectif. Quoique…
Le président de la République continue de croire en son bilan et à des résultats qui devraient arriver d’ici la fin de l’année. Néanmoins avec 14% d’intention de vote au premier tour, selon le dernier sondage Cevipof-Ipsos, François Hollande est au plus bas et un rebond devient incertain. Ses plus fidèles soutiens ont lancé l’opération de reconquête du printemps avec une émission le 14 avril sur France 2 puis une présence renforcée sur le terrain. La campagne de 2017 commence à s’organiser, Julien Dray est évoqué comme possible directeur de campagne et les réunions préparatoires à l’Elysée se multiplient. Le problème, c’est que les Français « n’impriment plus »…
Alors l’initiative d’Emmanuel Macron pourrait s’inscrire, dans un premier temps, dans la stratégie de reconquête de François Hollande. Nombreux sont ceux à envisager une recomposition politique après l’élection présidentielle de 2017, la création de « En marche ! » pourrait en être une première étape. Ainsi, François Hollande pourrait appuyer sa candidature pour un second mandat sur un PS, expurgé des « ultras » de la gauche et Emmanuel Macron appellerait son mouvement transpartisan à le soutenir : François Hollande deviendrait alors le candidat d’une nouvelle France réformatrice et pragmatique.
Dans le cas où le président de la République décidait de ne pas se représenter, ce qui semble très improbable, « En marche ! » pourrait constituer un outil original et différenciant pour réunir les Français écoeurés par les vieux combats partisans au service de seules ambitions présidentielles. Emmanuel Macron, avec ses 38 ans, son originalité, sa forte popularité auprès des électeurs de droite, pourrait constituer un sérieux concurrent face à un candidat socialiste très à gauche et un candidat issu de LR plus à droite que lui et, vraisemblablement, plus âgé…
Il existe une autre voie pour Emmanuel Macron. François Hollande a commenté son initiative d’un sibyllin « il fait de la politique » quand le premier Ministre et quelques autres l’ont, une fois de plus, critiqué. Les chefs d’entreprise sont sous le charme et prêts à faire confiance à ce Ministre, jeune et plein de fougue, qui a tenté ces deux dernières années de mener des réformes ambitieuses. Si son mouvement prend une véritable place dans l’échiquier politique avec un nombre conséquent d’adhérents, alors il pourrait s’imposer comme l’un des acteur incontournable de la présidentielle, y compris pour les candidats LR. Pourquoi ne pas envisager alors de rejoindre « le candidat du second tour » quel qu’il soit et s’ouvrir la voie vers Matignon ?
Emmanuel Macron s’est donc bien mit « En marche ! » vers son destin et il s’est créé un champ des possibles très ouvert.