C’est la rentrée, alors lancez-vous dans une démarche organisée de lobbying. Simon Janvier, journaliste à la Radio des Entreprises (RDE) et Mathieu Quétel, président de Sountsou, vous proposent, dans le nouveau numéro de l’émission « Lobby or not Lobby », quelques conseils opérationnels pour initier votre démarche.
Vous pouvez lire le script de l’émission ci-dessous ou écouter le podcast en vous rendant ici.
Simon Janvier : Bonjour et bienvenue pour ce nouveau rendez-vous de « Lobby or not lobby » avec Mathieu Quétel, président de Sountsou – Affaires Publiques. Mathieu, bonjour, en cette rentrée vous lancez un appel aux chefs d’entreprise et vous leur dîtes « Pour votre lobbying, misez sur les primaires ! »
Mathieu Quétel : Bonjour Simon. Tout à fait. Cette rentrée 2016 est l’occasion rêvée pour les fédérations professionnelles et les entreprises de se faire entendre des politiques et de porter leurs propositions auprès des candidats. Les primaires de la droite et de la gauche sont vraiment idéales.
D’accord Mathieu mais c’est large et on se sent un peu perdu face à tous ces candidats, alors comment faire ?
Le meilleur conseil que je puisse donner est de faire simple. Misez donc sur votre lobbying territorial. Regardez si vos élus de proximité, quel que soit leur mandat, sont impliqués dans telle ou telle équipe de campagne, ou quel candidat ils soutiennent. Ensuite, contactez les, afin qu’ils relaient vos propositions. Vous pouvez également vous intéresser directement au staff de chaque candidat, il y a sans doute un référent pour chaque thématique.
On évoque souvent les élections pour organiser des actions de lobbying, mais enfin, il est peu vraisemblable que des propositions soient intégrées dans les programmes.
Les primaires et les campagnes en général constituent un excellent moment pour se faire connaître et entrer en contact avec les décideurs. Mais vous avez raison, l’objectif n’est pas tant que vos propositions soient retenues que de vous imposer en tant qu’expert sur votre thématique principale. Ensuite, il y a de fortes chances que vous soyez recontacté et consulté au moment des débats en cas d’évolution de la loi. C’est bien votre objectif afin de faire prospérer vos propositions.
C’est donc beaucoup de travail pour peu de résultat immédiat.
C’est un sujet intéressant que vous soulevez Simon. En effet, la plupart des chefs d’entreprise ou des fédérations professionnelles considèrent que des actions de lobbying ne sont efficaces qu’en situation de crise avec un résultat visible rapidement. Or, en ce qui me concerne, je préconise le lobbying de fond, c’est à dire dans la durée, c’est ainsi que vous pourrez construire votre relationnel et votre réputation d’expert dans votre domaine. Les décideurs écouteront plus volontiers un expert qu’ils connaissent plutôt qu’un nouveau venu. Dans les actions d’influence, la crédibilité est un facteur important pour peser sur les décisions et faire prospérer des propositions. Même s’il n’est pas le seul.
Justement, comment faire connaître ses propositions et ses objectifs, on dresse une liste et on l’envoie aux candidats ?
Surtout pas ! C’est un véritable travail de tri auquel vous devez vous livrer. Je vous conseille de personnaliser vos propositions en fonction des candidats. Vous avez de la chance les primaires sont multiples et vous avez un très large choix de candidats. Si vous n’avez pas le temps de personnaliser alors fixez vous un objectif, déterminez un message clair à porter sur une préoccupation essentielle pour vous. Les politiques sont souvent confrontés à ce que j’appelle « les listes de courses » dont ils ne savent que faire. Alors aidez-les !
C’est tout de même un peu aux politiques de nous aider, là, vous inversez les rôles.
Si vous vous inscrivez dans une démarche de lobbying, cela signifie que vous recherchez un résultat, une efficacité. Pour l’obtenir, il faut savoir faire preuve d’empathie. Mettez vous à la place du politique, il ne connaît pas forcément votre secteur d’activité, il est submergé de demandes multiples et variées. Si vous clarifiez les vôtres, vous sortirez du lot. C’est le résultat qui compte.
Et faut-il chercher à avoir un rendez-vous physique ou un courrier suffit ?
Je considère que le courrier est votre dernier recours. La priorité c’est d’obtenir un rendez-vous, idéalement avec le candidat mais parfois il est préférable de voir le spécialiste de son staff de campagne sur la question que vous souhaitez soulever. En outre, il faut que vous pensiez au coup d’après.
Le « coup d’après », qu’entendez-vous par là ?
Il y a de grandes chances que le spécialiste du candidat que vous rencontrerez ait ensuite des responsabilités dans le secteur d’activité qui vous intéresse. Il ne sera pas forcément Ministre, il peut intégrer un cabinet, devenir parlementaire et intégrer une Commission qui vous intéresse, devenir le spécialiste référent du parti etc. De toute façon, chaque contact vous sera utile pour la durée de la mandature, que la personne soit dans la majorité ou dans l’opposition.
Cela suppose donc de s’engager sur une action de long terme.
Pour être efficace, le lobbying ne peut se limiter à du « one shot ». Dans la plupart des cas s’investir dans une action de fond peut se révéler très rentable et d’une excellente efficacité. Je vous invite à réfléchir sur un constat que j’ai pu faire au fil des années : la plupart des acteurs ne travaillent pas leur sujet en profondeur, ils ne construisent pas de relation avec les décideurs publics. Imaginez, l’efficacité de ceux, qui au contraire, effectuent ce travail. Elle peut-être redoutable.
Vous nous donnez l’envie d’aller plus loin et nous aurons l’occasion d’en reparler lors d’un prochain numéro de « Lobby or not lobby ». Merci Mathieu Quétel, je rappelle que vous êtes le président de Sountsou- Affaires Publiques.