L’actu

La mémoire d’Edgar Faure

Rodolphe Oppenheimer est le président-fondateur du Prix Littéraire du livre politique de l’année Edgar Faure, qui sera remis le 24 novembre prochain à la Mairie du XVIème arrondissement de Paris. Il est également le petit-fils du Président Edgar Faure. 

Newsroom-Sountsou : Votre grand père a profondément marqué la vie politique française. Il était notamment connu pour ses analyses fines et ses phrases ciselées. S’il était encore parmi nous aujourd’hui, quel regard porterait-il sur l’actualité politique ?

Rodolphe Oppenheimer : Mon grand-père était un homme d’ouverture et d’expérience. Une de ses plus belles phrases était : « l’immobilisme est en marche et rien ne pourra l’arrêter. »

Ceci exprime encore sa pensée, je pense sincèrement qu’il interviendrait auprès des politiques pour enrichir le débat. Une de ses grandes idées était le « Nouveau Contrat Social », cette approche permettait de faire cesser les clivages et d’utiliser au mieux les compétences existantes.

Pourquoi un bon ministre de la justice de droite ne ferait pas un bon ministre de la justice, peu importe la couleur du gouvernement ? Et pourquoi un bon ministre de l’économie de gauche, ne ferait pas un bon ministre, qui pourrait rester des années en place afin de résoudre les difficultés liées à son ministère ?

Et d’ailleurs les députés qui auraient travaillé pour la collectivité d’après ce « Nouveau Contrat Social » serait en charge – bien au-delà de leurs rapports et commissions – de la mise en œuvre de leurs propositions, sans tenir compte de l’étiquette politique.

Cela fonctionne bien dans plusieurs pays où le clivage est moins important qu’en France et où la tendance politique ne se choisit pas en fonction des places à prendre dans tel ou tel parti en sortant de l’ENA.

Pour le Sénat, Edgar Faure ne lui faisait pas confiance et prônait sa suppression, ne disait-il d’ailleurs pas : « Sénat ? Litanie,  liturgie, léthargie ! Et pourtant il y a aussi de belles compétences au Sénat.

D’autre part, il vous rejoindrait dans votre action, l’entreprenariat était selon lui constitutif de la richesse d’un pays. Aider les entreprises était son credo, il suffit de lire « La banqueroute de Law » écrite par mon grand-père en 1977, pour se rendre compte à quel point les finances globales ont des répercussions sur la vie des entreprises. Il n’hésitait pas à affirmer que cette banqueroute participa au désendettement de l’État royal qui parvint à payer ses dettes et à augmenter ses revenus, car Law, en créant une richesse plus mobile, a contribué à faire renaître l’agriculture et à stimuler le commerce et l’industrie générateurs de nouvelles recettes fiscales.

Newsroom-Sountsou : Quel est l’objectif du Prix du livre politique Edgar Faure, qui fêtera son dixième anniversaire l’an prochain ?

Rodolphe Oppenheimer : Dix ans. C’est formidable et j’en profite pour remercier tous les amis qui m’ont aidé à planifier, organiser, animer le Prix Littéraire du Livre Politique de l’année plus communément appelé « Prix Edgar Faure ».

Il a reconnu pendant des années des gens qui sont devenus des acteurs importants de la vie politique française : journalistes, femmes et hommes politiques, chroniqueurs et autres commentateurs de nos institutions, je pense à Apolline de Malherbe, Bruno Le Maire, Mathieu Laine, Abd Al Malik, Florence Pavaux-Drory et Natacha Polony.

Je ne peux pas non plus oublier les membres du jury, toutes et tous sont des politiques ou des acteurs de la vie politique qui critiquent avec beaucoup de respect et de pertinence les livres en sélection. Je ne peux tous les citer, ils ont cependant en commun d’être tous des démocrates et des progressistes peu importe leur parti.

Pour faire écho à votre Newsroom-Sountsou, nous avons ou avons eu également de nombreux chefs d’entreprises.

Notre objectif reste le même : reconnaître des ouvrages qui apportent des analyses ou des idées sur la vie politique.

Newsroom-Sountsou : Comment qualifieriez-vous ce cru 2015, avec ces quatorze ouvrages de la sélection ?

Rodolphe Oppenheimer : Il est excellent, chaque année apporte son lot de découvertes : biographies, enquêtes politiques, essais et même pamphlets, tout nous intéresse et 2015 réservera quelques surprises.

Newsroom-Sountsou : Votre Prix a une tradition de découverte de jeunes talents politiques, comme ce fut le cas l’an dernier avec Lydia Guirous devenue depuis porte parole des Républicains.

Rodolphe Oppenheimer : C’est exact et si l’on ne s’arrête pas qu’au gagnant final, on s’aperçoit que dans notre sélection beaucoup de talents sont réunis. Nous espérons, modestement, continuer à éclairer la voie de la démocratie.

La sélection 2015 des ouvrages pour le Prix du livre politique Edgar Faure est à découvrir ici.

Rodolphe Oppenheimer :

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Montaigne décrypte les régionales

Le Think Tank met en ligne le 2 novembre un site dédié au décryptage des élections régionales des 6 et 13 décembre.

À l’occasion des élections régionales des 6 et 13 décembre prochains, l’Institut Montaigne propose dès le 2 novembre un site dédié à l’analyse des enjeux de ce scrutin et de l’impact des programmes présentés par les principaux candidats dans les 13 nouvelles régions.

Cette initiative s’inscrit dans la continuité des opérations déjà conduites à l’occasion de l’élection présidentielle de 2012 et des municipales de 2014. Elle poursuivra les mêmes objectifs : fournir aux électeurs une information impartiale et inédite sur les propositions qui leur seront soumises, leur incidence budgétaire et la cohérence d’ensemble des programmes… Il s’agit d’inciter les candidats à davantage de transparence et de responsabilité dans leurs engagements.

Lors des précédents scrutins l’Institut Montaigne proposait des dossiers de décryptage des programmes et des chiffrages de leur impact dans la vie quotidienne des citoyens.

Une initiative intéressante et utile, de nature à nourrir le débat.

Pour vous rendre sur le site, c’est ici.

Présidentielle 2017 : les entrepreneurs doivent y prendre part

La première étape vers l’élection présidentielle de 2017 est très concrètement lancée, surtout à droite, mais à gauche la situation commence également à s’éclaircir. Il est donc grand temps pour les entrepreneurs de prendre part au débat et de se lancer dans la bataille. Revue des troupes en présence.

Il devrait y avoir du côté de la droite neuf candidats à la primaire. Six se sont déjà déclarés, il s’agit d’Alain Juppé, François Fillon, Xavier Bertrand, Nadine Morano, Hervé Mariton et de Jean-Frédéric Poisson. S’il prétend se consacrer totalement au soutien des candidats aux élections régionales de décembre, il ne fait guère de doute que Bruno Le Maire sera également candidat. Nathalie Kosciusko-Morizet a fait savoir indirectement qu’elle se lancerait probablement dans l’aventure. Quand à Nicolas Sarkozy, l’annonce officielle de sa candidature pourrait intervenir peu après les élections régionales.

À gauche, la situation s’éclaircie également, le premier vote du budget 2016 à l’Assemblée Nationale a permis de constater le dégonflement des frondeurs. François Hollande a chaussé ses bottes de sept lieux qui le conduisent un peu partout en France à un rythme effréné qui confirme sa détermination à se représenter. Les écologistes finissent de se fissurer et les élections régionales devraient marquer l’échec de leur stratégie d’affrontement avec la majorité présidentielle. Du coup, la récente création du parti « Écologistes ! » puis, dans la foulée, de l’UDE (Union des démocrates et écologistes) autour de Jean-Luc Benhamias, Christophe Madrolle, Jean-Vincent Placé et François de Rugy, apparait comme l’annonce d’un début concret de recomposition de la majorité présidentielle, qui devrait se concrétiser après les élections régionales dans un remaniement ministériel assez large et ouvert.

Dans ce contexte, les entrepreneurs qui souhaitent d’investir dans la bataille de la présidentielle et faire entendre leur voix et leurs propositions disposent déjà d’une bonne base pour se lancer. Les équipes de campagne sont presque toutes en place, les candidats putatifs en pleine réflexion et les programmes ne sont pas encore tout à fait posés.

C’est clairement dès à présent qu’il faut agir et se mettre en mouvement pour être en mesure de participer à ce débat, crucial pour les six prochaines années. Notre Cahier Experts « Présidentielle 2017 : 10 conseils pour faire entendre la voix des entrepreneurs » est déjà disponible en version numérique ici ou version papier sur simple demande ici. Il vous est offert. Il est également accompagné d’un cycle de conférences gratuites, sur simple demande ici.

Pour une nouvelle législature avec des réformes concrètes et une démocratie plus ouverte sur le monde de l’entreprise, il est décidément grand temps que les entrepreneurs s’investissent pleinement dans le débat. Lancez-vous !

Mathieu Quétel, président de Sountsou.

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Hervé Novelli, le ministre des entrepreneurs

Hervé Novelli était Secrétaire d’État aux PME pendant la présidence de Nicolas Sarkozy. Il est, notamment, le créateur du statut d’autoentrepreneur dont on entend beaucoup parler en ce moment. Il vient de lancer la plate forme numérique WikiPME, un site de rencontre et d’échange pour les entrepreneurs de France. Il nous donne son avis sur les réformes à mettre en oeuvre et nous explique les objectifs de WikiPME.

Newsroom-Sountsou : Le statut d’autoentrepreneur, que vous avez créé en 2008, est au devant de la scène, les Français s’en sont emparés et il semble parfait, notamment, pour accompagner les nouveaux métiers du numérique. 7 années après, quelles améliorations proposeriez-vous ?

Hervé Novelli : Plus d’1 Million de Français ont opté pour ce statut simple, moderne et pertinent qui leur permet facilement de se lancer dans l’entrepreneuriat. Le statut d’autoentrepreneur est un statut qui permet soit d’améliorer ses revenus soit d’évoluer ensuite, en fonction de son développement, vers d’autres formes juridiques. Je suis convaincu qu’il faut préserver ses avantages et sa simplicité tout en élargissant la base des Français qu’elle concerne. Je ne saurai vous dire combien d’entrepreneurs j’ai pu rencontrer qui aujourd’hui sont en SAS ou SARL, alors qu’ils se sont lancés en autoentrepreneur. Je m’en réjouis.

Newsroom-Sountsou : Que répondez-vous à ceux qui considèrent que ce statut est fragile et qu’il met ceux qui le choisissent dans une situation précaire ?

Hervé Novelli : Je comprends ces remarques mais elles font partie, hélas, de la vie de l’entrepreneur : quand on entreprend, on prend des risques, on accepte de se tromper et de tomber parfois. Le statut a aussi un objet : permettre à chacun de mettre le pied à l’étrier. Quand on sait monter à cheval, alors on peut choisir une monture plus puissante et pérenne. Mais pour débuter, souvent, il est préférable d’utiliser un statut qui a de nombreux avantages. C’est le sens de l’histoire.

Newsroom-Sountsou : Une loi sur le Code du travail vient d’être annoncée pour 2016 par le président de la République. Quelles réformes vous semblent prioritaires ?

Hervé Novelli : Je ne vous cacherais pas que je suis convaincu qu’un Code du Travail destiné aux TPE et PME me semble incontournable. Je trouve, au mieux inutile, au pire nuisible, que les TPE et PME soient de plus en plus soumises à des règles complexes. Par exemple dans une TPE d’une dizaine de salariés, le dialogue direct est essentiel, il ne faut pas rigidifier cela avec des enjeux réglementaires ! Le Code du Travail actuel peut convenir aux grands groupes. Pour les TPE et PME, il faut impérativement que la décision et la gestion de leur entreprise soit lancée, en premier niveau, aux collaborateurs, pour seulement ensuite remonter au niveau de la loi si jamais il n’y a pas d’accord. Quand une Direction et des salariés volontaires souhaitent travailler jusqu’à minuit par exemple, pourquoi devrions-nous les en empêcher…

Newsroom-Sountsou : Vous avez fondé WikiPME, une plate-forme de services internet qui se présente comme la « 1ère communauté solidaire des entrepreneurs de France », pouvez-vous nous la présenter ?

WikiPME est un espace digital nouveau. Notre ambition est d’apporter des réponses à tous les entrepreneurs – en matière réglementaire mais également de gestion quotidienne – et de proposer des services personnalisés et géolocalisés à côté de chez eux. En référençant les entrepreneurs inscrits sur WikiPME, nous pouvons leur proposer des profils, des compétences ou des outils à côté de chez eux et qui seront une solution pour leur problème. Je crois également au fait que WikiPME soit encore plus un espace de valeurs, comme le partage, l’entraide, et que les entrepreneurs puissent s’y exprimer, sortir de leur isolement et rencontrer leurs pairs.

Newsroom-Sountsou : Les entrepreneurs sont exaspérés par les charges et les lourdeurs administratives. Ils ne croient plus en la politique. Pensez-vous qu’il soit encore possible de les convaincre que les promesses électorales seront tenues, en cas d’alternance en 2017, et que des réformes seront engagées ?

Ma conviction est simple : plus les entrepreneurs seront regroupés – c’est l’objet de WikiPME – dans une communauté puissante et agissante sur Internet, mieux ils ont des chances d’être entendus. 100 000 entrepreneurs à la fin de 2016 dans la communauté WikiPME et, croyez-moi, le monde politique les écoutera et résoudra les problèmes fiscaux, sociaux et réglementaires auxquels ils sont aujourd’hui confrontés !

Démocratie participative et lobbying 3.0

Le projet de loi pour une République numérique a fait l’objet d’une démarche inédite de la part du gouvernement : un débat ouvert sur le net avec possibilité pour les citoyens de participer et de déposer leurs propres contributions et de voter sur chacun des articles de ce projet défendu par la Secrétaire d’Etat à l’économie numérique, Axelle Lemaire.

Axelle Lemaire a réussit une belle opération de consultation citoyenne puisque 147710 votes ont été recueillis, pour un total de 21330 participants et, surtout, 8501 contributions ont été déposées. Le gouvernement s’est félicité de ce succès et a salué le fait que les articles de ce projet de loi a recueilli une moyenne de 75% de votes favorables.

La grande diversité des contributions est frappante, des citoyens y ont participé, des spécialistes ainsi que des représentants d’intérêts variés. C’est peut-être dans ce dernier domaine que réside la principale innovation, les contributions des différents lobbies sont transparentes et permettent ainsi de comprendre qui défend quelle position et d’où parlent ceux qui proposent telle ou telle disposition particulière. Une avancée qui mériterait d’être creusée pour d’autres projets de loi.

Il n’est pas anodin que cette démarche ait été initiée par Axelle Lemaire, jeune ministre à la culture anglophone. On se souvient qu’avant l’été son projet de loi avait été l’objet d’une polémique interne au gouvernement, son ministre de tutelle, le bouillonnant Emmanuel Macron, revendiquant une large part de propositions dans le domaine de l’économie numérique dans le cadre de sa loi Macron 2.

Au final, l’arbitrage du Premier ministre en faveur d’Axelle Lemaire est payant. Non seulement son projet de loi est de bonne facture mais il constitue dans le débat public, numérique et transparent qu’il a permis, une première particulièrement intéressante pour l’avenir.

D’abord, cette démocratie participative qui permet à chacun de contribuer à l’élaboration d’un projet de loi est de nature à retisser un lien fort entre les citoyens et le débat public. Le nombre, la qualité des contributions impressionnent pour un sujet à priori technique.

La façon avec laquelle les différents lobbies s’expriment, publiquement, est également une piste à explorer. Le débat est public, les positions de chacun sont posées. Certes, d’autres propositions peuvent être portées directement auprès des parlementaires et ces derniers doivent encore faire leur travail au sein des commissions puis en séance publique, néanmoins, il sera plus facile d’identifier les promoteurs des amendements qui pourraient être déposés dans le cadre du travail législatif. C’est également une avancée.

Enfin, ce projet de loi montre également ce que pourrait être une nouvelle démarche législative pour un gouvernement plus moderne : moins de lois, mieux partagées, plus discutées. La course législative actuelle ne permet plus aux parlementaires de faire convenablement leur travail de législateur, elle est devenue insupportable pour le monde de l’entreprise mais également pour l’ensemble de nos concitoyens qui ne comprennent plus les décisions qui s’appliquent ou pas, et qui se trouvent perdus dans un magma de normes et de règlements divers.

Cette approche participative et transparente de la démocratie, initiée par le projet de loi de Madame Lemaire, permet également de légitimer un peu plus le travail des représentants d’intérêts, qui vise avant tout, lorsqu’il est bien fait, à éclairer les décideurs publics sur les effets possibles des lois.